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scuderia57

Henri Pescarolo

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Henri-Jacques William Pescarolo (né le 25 septembre 1942 à Paris) est un pilote automobile français, devenu patron d'écurie et chef d'entreprise en montant son propre team, Pescarolo Sport, début 2000. Pilote complet, il est surtout connu pour son record de participation aux 24 Heures du Mans (33 fois), et ses quatre succès sur le célèbre circuit de la Sarthe.



Henri Pescarolo a son premier contact avec le sport automobile en 1962 en sport lorsque son père, médecin, s'inscrit dans un rallye amateur réservé aux médecins. Connaissant le goût pour la vitesse de son fils Henri, alors étudiant en médecine, il lui propose de partager le volant de sa Dauphine 1093 au rallye de La Baule. Si les espoirs des Pescarolo de bien figurer au classement sont rapidement anéantis par une sortie de route, l'expérience ne fait que renforcer l'intérêt d'Henri pour l'automobile tandis qu'il peine à se passionner pour ses études. Dans les mois qui suivent, il s'inscrit à l'école de pilotage de l'AGACI (Association Générale Automobile des Coureurs Indépendants) à Montlhéry, dont il se montre l'élève le plus brillant. Il est choisi pour représenter la région Île-de-France dans la Coupe des Provinces, épreuve nouvellement créée et parrainée par Ford France et le magazine Sport Auto fondé par les anciens pilotes Jean Lucas et Gérard Crombac. L'objectif de cette compétition est de découvrir de nouveaux talents en les faisant s'affronter au volant de Lotus Seven. Si la Coupe revient finalement à l'équipe du Rhône (pilote Robert Mieusset dit Jimmy), Pescarolo s'affirme, avec trois victoires, comme le pilote le plus doué de la promotion, dans laquelle on trouve également José Dolhem et Patrick Depailler.

En 1965, Henri Pescarolo qui tire un trait définitif sur ses études, est recruté par Matra, en quête de reconnaissance internationale et qui pense que la compétition automobile est un bon moyen de montrer son savoir-faire technologique. Matra constitue une filière de pilotes pour grimper les échelons du sport automobile. Pescarolo effectue ses débuts en Formule 3 le 3 octobre 1965 aux Coupes du salon à Monthléry aux côtés de Jean-Pierre Jaussaud et Jean-Pierre Beltoise.


L'année suivante, la montée en Formule 2 de Beltoise permet à Pescarolo d'être titularisé en Formule 3. Battu au championnat par son nouvel équipier Johnny Servoz-Gavin, il se rattrape en décrochant le titre en 1967, en établissant le record de 11 succès au cours de la saison. En fin d'année, devenu l'un des pilotes les plus en vue du sport automobile français, il débute en championnat d'Europe de Formule 2.

En 1968, la carrière de Pescarolo prend une dimension internationale. Vice-champion de France et vice-champion d'Europe de Formule 2 derrière son coéquipier Jean-Pierre Beltoise, il effectue également ses débuts en Formule 1 au mois de septembre à l'occasion du Grand Prix du Canada (Pescarolo avait participé l'année précédente au Grand Prix d'Espagne à Jarama, mais au volant d'une Formule 2, terminant septième de cette course F1/F2 hors championnat). Puis, la semaine suivant ses débuts en F1, il conquiert le cœur du public français à l'occasion des 24 Heures du Mans, organisées exceptionnellement à l'automne en raison des événements de Mai 68. Pour sa troisième participation à l'épreuve mancelle, Pescarolo nourrit de grandes ambitions au volant de sa Matra MS630 jusqu'à ce que, vers 2 heures du matin, sous la pluie, l'essuie-glace tombe en panne. Jugeant impossible de poursuivre la course, son coéquipier Johnny Servoz-Gavin rentre au stand pour abandonner. Lagardère, patron de Matra, réveille Henri Pescarolo pour lui annoncer l'abandon, le moteur de l'essuie-glace étant inaccessible. Pescarolo décide alors de prendre le volant mais l'équipe l'arrête au tour suivant pour lui demander si tout va bien. « Vous m'arrêtez pour ça ? Vous faites chier ! » répond Pescarolo en repartant en trombe. Malgré le manque de visibilité, il se hisse en deuxième position au petit matin, devant une foule totalement acquise à sa cause après son exploit nocturne. Mais, à seulement deux heures de l'arrivée, à la suite d'un passage sur un débris (conséquence possible du grave accident de Mauro Bianchi), un pneu éclate à haute vitesse, endommage gravement la voiture et les contraint à l'abandon.


L'ascension de Pescarolo est stoppée en 1969. Leader du championnat de Formule 2, il subit un grave accident, le 16 avril, lors d'essais privés préparatoires aux 24 Heures du Mans. Victime d'un défaut aérodynamique (les suspensions arrière se compriment excessivement et l'avant se déleste), la Matra MS640 s'envole dans la longue ligne droite des Hunaudières et retombe dans la forêt qui borde la piste. Brûlé et sévèrement touché à la colonne vertébrale (fracture des 6e et 7e vertèbres dorsales), Pescarolo tente de retrouver au plus tôt sa condition physique mais se contentera de commenter l'édition des 24 Heures du Mans sur Europe 1 en direct de sa chambre de la clinique de Passy. Il ne reprend finalement la compétition qu'à l'été.

En 1970, remis de ses blessures, il est titularisé en Formule 1 chez Matra, aux côtés de Jean-Pierre Beltoise. Malgré une troisième place au Grand Prix de Monaco, une deuxième place au Tour de France automobile[4] et un titre de champion de France Formule 1/Formule 2 (lors des épreuves internationales de F2 et F1, la Fédération française effectuait un classement interne afin de déterminer le meilleur Français, lui décernant ainsi le titre de champion de France), sa saison est globalement décevante, à tel point qu'à la fin de l'année, Matra le remplace par le Néo-Zélandais Chris Amon.

En 1971, Pescarolo fait face à un double programme : en F1, il est recruté par l'écurie de Frank Williams qui engage des March 711 à titre privé, tandis qu'en endurance il trouve refuge chez Alfa Romeo sur la 33-3.

Si sa saison de Formule 1 se transforme rapidement en galère (la March souffre d'une fragilité excessive du châssis et des suspensions et les moyens financiers de Frank Williams sont modestes), le pilote n'est pas en cause puisqu'il signe une quatrième place au Grand Prix de Grande-Bretagne et le record du tour au Grand Prix d'Italie. Il a par contre la satisfaction d'effectuer plusieurs belles performances en Endurance (victoire aux 1 000 km de Brands Hatch en équipage avec Andrea de Adamich et trois podiums).

En 1972, il repart en F1 toujours sur la March 711 engagée par Williams, où il continue d'enchaîner les mauvais résultats, mais aussi en F2 chez Rondel, nouvelle écurie fondée par Ron Dennis (victoire à Enna). Par contre, il ne décroche pas de volant en Endurance après la non-reconduction de son contrat par Alfa Romeo. Matra le rappelle pour Le Mans et l'associe au vétéran britannique Graham Hill. À l'issue d'un long duel avec l'équipage Cevert-Ganley (aussi sur Matra), Pescarolo et Hill remportent pour la première fois l'épreuve mancelle.

En 1973, sans volant régulier en F1 (seulement trois participations au championnat du monde, une sur March et deux sur Iso), Pescarolo fait son retour en tant que titulaire dans l'écurie Matra d'Endurance, où son succès de l'année précédente au Mans a évidemment fait remonter sa côte. Il dispute également le championnat d'Europe de F2 au volant d'une Brabham engagée par Rondel. La saison commence plutôt bien (victoire aux 6 Heures de Vallelunga, aux 1 000 km de Dijon et en F2 à Thruxton) quand March lui demande de remplacer ponctuellement Jean-Pierre Jarier au Grand Prix d'Espagne de F1 (Pesca n'obtient qu'une modeste huitième place). Les 24 Heures du Mans offrent une alléchante affiche avec quatre Matra et trois Ferrari engagées. À l'issue d'une fantastique bagarre contre l'équipage Jacky Ickx-Brian Redman, le tandem Pescarolo-Larrousse remporte la course. Ils récidivent lors des 1 000 km de Zeltweg et des 6 Heures de Watkins Glen et Matra décroche alors le titre de champion du monde des constructeurs devant Ferrari. L'année 1973 vaut à Henri Pescarolo le Prix Roland Peugeot de l'Académie des sports du plus bel exploit automobile français de l'année.

En 1974, Pescarolo rejoint l'écurie BRM en F1, mais celle-ci n'est plus que l'ombre de la fabuleuse équipe des années 1960. Il n'obtient comme meilleur résultat qu'une neuvième place au Grand Prix d'Argentine. Par contre, au côté de Larrousse, il continue chez Matra à enfiler les victoires comme des perles en Endurance (1 000 km d'Imola, 1 000 km d'Autriche, 6 Heures de Kyalami et en point d'orgue de la saison, les 24 Heures du Mans). Pescarolo signe là sa troisième victoire consécutive en terre mancelle. Matra remporte le championnat du monde des constructeurs et décide de ne poursuivre désormais la compétition qu'en tant que simple motoriste de F1.

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En 1975, Pescarolo signe chez Willi Kauhsen qui engage des Alfa Romeo 33 TT 12. Il gagne à trois reprises (Spa, Zeltweg et Watkins Glen) et permet à Alfa de remporter le championnat du monde des constructeurs devant Porsche. Comme Alfa ne dispute pas les 24 Heures du Mans, il court sur une Ligier JS2 (coéquipier de François Migault) mais doit abandonner à la 14e heure. Il remporte aussi son premier titre de champion de France des circuits.


1976 est le début d'une traversée du désert pour Pesca. Il tente un ultime retour en F1 au volant d'une Surtees mais une nouvelle fois la voiture n'est pas performante et les moyens manquent. Pesca abandonnera la F1 définitivement à la fin de la saison après 56 Grand Prix et un palmarès peu étoffé en regard de son talent. Il manque également de flair en refusant une proposition de Porsche pour conduire une 936 au Mans pour signer chez Inaltera -Jean Rondeau : Ickx remporte Le Mans au volant de la 936, Pescarolo ne finissant que huitième au général (néanmoins vainqueur au classement GTP).

1977 et 1978 ne sont pas des saisons mémorables pour le sprinteur devenu marathonien. Il pilote pour Porsche mais abandonne à deux reprises au Mans, toutefois, il remporte trois courses pour le Kremer Racing aux côtés de Bob Wollek et remporte son deuxième titre de champion de France des circuits en 1978.

À partir de 1979, il retourne chez Rondeau qui aligne désormais des voitures sous son propre nom et ambitionne de remporter les 24 Heures du Mans, Jean Rondeau gagnera en 1980, mais sans Pescarolo.


Pescarolo met sa carrière de pilote automobile entre parenthèses et se consacre à ses autres passions. Il établit un record en ULM entre Paris et Londres, bat les records de vitesse New York-Paris et Los Angeles-New York en avion monomoteur et gagne la course Paris-Libreville en monomoteur en 1984.

En 1984, il retourne, avec succès, à ses premières amours. Il remporte pour la quatrième fois les 24 Heures du Mans (associé à Klaus Ludwig) au volant d'une Porsche privée préparée par le Joest Racing. La même année il est sacré champion de France des circuits et remporte la Porsche Cup qui récompense le meilleur privé engagé en championnat du monde d'endurance.
En 1985, Pescarolo signe chez Lancia mais les performances de la LC2 sont inférieures à celles des Porsche : il ne termine que septième au Mans. En 1986, il passe chez Kouros Racing Team-Sauber qui aligne des C9 motorisées par Mercedes. Il abandonne au Mans en 1986 et 1987 mais remporte sa dix-septième victoire en championnat du monde d'endurance au Nürburgring 1986 avec Mike Thackwell. Jaguar lui propose de piloter une XJR9LM pour Le Mans 1988, avec Raul Boesel et John Watson. Ils abandonnent durant la nuit sur rupture de transmission, laissant la victoire à un autre équipage Jaguar. 1988 est aussi l'année où Pescarolo termine pour la première fois le rallye Paris-Dakar, en dix-huitième position, sur une Peugeot 405 Turbo 16 officielle.

Il termine sixième au Mans en 1989 sur Porsche 962C, et s'impose en 1991 lors des 24 Heures de Daytona. Il réitère sa sixième place au Mans en 1992 sur Cougar. En 1994, la Cougar s'appelle Courage et l'équipage Pescarolo-Lagorce-Ferté décroche la pole position des 24 Heures du Mans. Ils sont en tête à mi-course avant d'abandonner sur casse moteur.
En 1994 également, le pétrolier Elf lui confie le soin de diriger une structure de formation de jeunes pilotes, la Filière. Grâce à lui, Sébastien Bourdais et Franck Montagny, entre autres, vont apprendre leur métier. De 1995 à 1999, il participe sur Courage-Elf-La Filière à l'épreuve mancelle (septième place en 1996 avec Collard et Lagorce et en 1997 avec Clérico et Belloc). Il raccroche son casque en Endurance après les 24 Heures du Mans 1999 où il termine neuvième sur Courage C50. Il détient le record absolu de départs au Mans avec 33 participations.


Lorsque Elf lâche La Filière, reprise en mains par la FFSA, Pescarolo décide de poursuivre en fondant en 2000 sa propre écurie d'endurance, Pescarolo Sport. La Courage C52 engagée au Mans en 2000 termine quatrième (Bourdais-Grouillard-Clérico) derrière les trois Audi officielles. De 2001 à 2003, il engage des Courage C60-Peugeot au Mans et pour quelques épreuves en FIA Sportscar (victoires à Estoril, Magny-Cours, Barcelone et Spa) mais les résultats au Mans sont moins bons (huitième et neuvième en 2003). En 2004, Pescarolo saute le pas en développant sa propre voiture à partir d'un châssis Courage C60 et avec un moteur Judd. Au Mans, la Pesca termine à nouveau quatrième derrière les intouchables Audi. L'écurie décroche également le quatrième rang du championnat Le Mans Series. Aux 24 Heures 2005, les Pescarolo-Judd ont échoué de peu pour la victoire face aux Audi, mais remportent le championnat.

En 2006, l'ennemi numéro 1 reste Audi qui tente un pari en engageant des motorisations diesel. Elles remportent Le Mans, la Pescarolo-Judd terminant à la deuxième place. L'écurie se consolera de cette frustration en remportant à nouveau le championnat Le Mans Series grâce à un grand chelem historique (cinq victoires à Istanbul, Spa, Nurburgring, Donington et Jarama).

Fin 2006, Pescarolo Sport décide de ne plus extrapoler les châssis destinés à la saison 2007 sur une base Courage mais de les concevoir en interne. Le fait que ces châssis (P01) pourraient être rentabilisés par une mise à disposition d'écuries privées a incité les teams Lister Racing et Rollcentre Racing à prendre contact avec Pescarolo Sport.
Le 15 juin 2010, Pescarolo Sport, alors propriété à 100 % de l'industriel Jean Py, est placé en redressement judiciaire. Un mois plus tard, le 12 juillet, le tribunal de commerce du Mans prononce sa liquidation judiciaire et la vente aux enchères se déroule le vendredi 15 octobre. Jacques Nicolet, propriétaire de OAK Racing, associé à Joël Rivière, rachète l'ensemble des biens de l'équipe pour 400 000 €. Un remarquable élan de générosité aboutit à la création de l'Association "Pescarolo 2011" puis Henri Pescarolo revient en course avec son équipe sous l'appellation Pescarolo Team.

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de Michel Lovaty

@Scuderia57: bravo pour cette biographie ! Tu m'avais caché tes talents
d'écrivain !
Je me permets,modestement, de la compléter par l'épisode suivant :
En 1975,Henri est inscrit au GP de Monaco sur la seconde "Surtees TS.16",au
côté de l'Irlandais John Watson. Las ! Avant même la fin des essais,John
Surtees lui retire sa voiture au profit de son 1° pilote. Henri se voit contraint
de déclarer forfait.
Voilà. Bien sûr,cette anecdote n'enlève rien à la qualité de tes écrits.

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Il n’existe sans doute pas un journaliste au monde qui connaît mieux Jean-Pierre Beltoise qu’Eric Bhat. c’est donc lui qui a recueilli
les incroyables révélations sur le « Pesca » que nous croyions tous connaître. Pesca chez ligier? c’est là aussi!

Par Jean-Pierre Beltoise.


Monaco, 1970, sur la MS 120. Première saison complète en F1 pour Pescarolo et un podium à Monaco. Qui dit mieux ?


C’est beau, c’est grand, c’est énorme : j’admire vraiment ce que Henri a réussi au Mans. Son palmarès était déjà riche de quatre victoires en tant que pilote. Il y avait eu aussi sa cavalcade héroïque sans essuie-glace sous la pluie, en plein mois de septembre à cause des grèves de Mai 68, avec des nuits évidemment plus longues qu’au mois de juin : moi, j’avais demandé à en être dispensé ! L’écurie qu’il a ensuite lancée et qu’il a réussi à faire vivre pendant plus de dix ans représente un exploit. Henri était, il aurait pu être, il avait la volonté de le devenir, le sorcier des 24 Heures du Mans. Il s’est bat- tu contre Audi, il s’est battu contre Peugeot, il s’est battu seul contre de grands industriels, il a signé des performances admirables, il a gagné des courses, il a souvent été porté en triomphe par son équipe. C’est inouï : il a failli gagner Le Mans avec son écurie et il a terminé deuxième. Chaque année, il parvenait à régler ses problèmes de financement, il y arrivait toujours. Il aurait pu aller très haut. Dans un contexte un peu plus favorable économiquement, son aventure aurait crû et embelli, j’en suis persuadé. Il a réellement démontré un talent d’organisateur d’équipe hors pair.
Il a tout monté tout seul. Il a embauché les bons ingénieurs, il a composé une équipe de mécaniciens solides et compétents, il a bossé des nuits entières, il a engagé au Mans des voitures rapides et fiables. Franchement, s’il avait gagné les 24 Heures, et il l’a presque fait, il ne l’aurait pas volé, tant son équipe possédait de qualités. Dans cette équipe, on le sentait, tout le monde se serait coupé les deux bras pour lui. Dieu sait s’il s’est battu pour elle. Chacun le lui rendait bien. Il méritait la fidélité dont il était entouré. J’ai la même fidélité vis-à-vis de lui.


Le Mans 1973. Merzario/Pace devancent Ickx/Redman, tous sur Ferrari 312PB. Derrière, les trois équipages Matra suivent : Beltoise/Cevert, Pescarolo/Larrousse, Jabouille/Jaussaud sur leurs Matra MS670B.


Que ce fût juste ou injuste, au tout début, au milieu des années 60, il n’était pas très bien considéré chez Matra, en tant que pilote. BP-France sponsorisait notre équipe, et sponsorisait également Pesca. C’est ainsi que Henri a été parachuté chez Matra. Il était déjà assez peu expansif, très réservé, très intériorisé, il parlait peu. Apparemment, il ne connaissait rien en mécanique. Moi j’étais plutôt volubile et mon passé moto m’avait apporté un bagage technique non négligeable. Henri pesait 15 ou 20 kilos de plus que moi. Il ne pouvait donc pas être plus rapide…
C’est pourtant là que j’ai commencé à l’apprécier vraiment. Il faut savoir que, chez Matra, nous pointions, nous étions salariés. Aucun volant n’était immédiatement disponible pour Henri à qui l’on confiait des tâches assez éloignées du pilotage. Un jour, on lui a demandé de laver les vitres. Il a pris du liquide et un chiffon et il l’a fait. J’étais très impressionné. Ce gars-là veut devenir pilote et, pour ça, il accepte de laver les carreaux. J’étais épaté !
Je me suis rapidement rendu compte que c’était un excellent pilote, un grand pilote même. Chaque fois que nous faisions des essais ensemble, nos temps étaient très comparables, alors qu’il était plus lourd que moi. D’ailleurs, je le charriais gentiment à ce sujet, ce dont il n’a jamais pris ombrage. Il montrait de véritables qualités humaines et, progressivement, nous sommes devenus très liés. Les hasards de la vie ont fait que, chez Matra, je suis devenu l’homme de la monoplace et lui l’homme du proto.


7 juin 1970 au Grand Prix de Belgique, à Spa. Beltoise devant Pesca sur les sublimes MS120. Ils finirent 3e et 6e. Une p… d’équipe de France, non ? On en rêve encore.


J’allais un chouïa plus vite que lui, car j’étais plus léger, il n’avait peut-être pas l’esprit aussi teigneux ou communicatif. Inversement, en proto, il était très endurant, il avait une grande résistance physique, il adorait relever les défis de l’impossible. Foncer dans le brouillard au Mans, la nuit, ne l’impressionnait pas, contrairement à moi. Et puis, c’est vrai qu’il avait son caractère. Un jour, au Grand Prix du Canada, sa MS 120 ne marchait pas. Il a pris un gros chatterton, l’a collé sur le volant, et il a inscrit dessus « poubelle ». Je ne l’invente pas. Cette photo était passée dans la presse. C’est vrai qu’il avait du mal à faire passer ses messages techniquement. En ce qui me concerne, nous avons souvent couru dans la même équipe ou sur la même voiture en endurance, souvent avec succès, comme à Montlhéry ou en Argentine notamment. Je n’ai pas le souvenir de la moindre anicroche entre nous. Nous partagions toujours les mêmes points de vue, nous étions très souvent ensemble en dehors de la course, nous voyagions ensemble, faisions des fiestas ensemble.
Nous aurions dû courir ensemble chez Ligier en Formule 1. Matra abandonnait la compétition. Guy Ligier nous a réunis, Henri et moi, en présence de mon copain Stéphane Collaro. Il nous a dit qu’il montait son écurie de F1 : « J’ai besoin de vous, et vous serez mes deux pilotes ! Etes-vous d’accord ? » Henri et moi nous rêvions français.


Enna, Sicile, le 24 août 1969, GP de F2. Jo Siffert devance Jean- Pierre Beltoise, Piers Courage, Clay Regazzoni, Johnny Servoz-Gavin, Francois Cevert, Henri Pescarolo, Robin Widdows et Jacky Ickx.


Nous avons foncé sur le projet. Jusqu’au jour où j’ai vu la coque pour la première fois, à Vichy. La première chose que j’ai dite à Ducarouge, c’est que Henri n’allait pas rentrer dedans, elle était trop étroite. « Ce n’est pas un problème », m’a-t-il répondu. « Comment ça, ce n’est pas un problème, je t’assure que Henri ne pourra pas rentrer dedans ! » Et là, j’ai compris que Pesca était éliminé du projet. L’histoire de Pesca en F1 s’arrête là. La mienne à peine plus loin, dans un essai tronqué. Henri et moi, vous le comprenez, nous avons découvert le mensonge et la fourberie…
Une profonde honnêteté intellectuelle
Tous les deux, nous avons continué nos chemins, et sommes restés très amis. Nous allions très souvent dîner chez Geneviève ex-Guénard, avant qu’elle ne meure. J’éprouve un énorme plaisir à côtoyer Henri, car je le vois en frère. C’est le seul pilote que je vois très régulièrement. J’ai toujours apprécié sa profonde honnêteté intellectuelle et sa détermination sans faille. Je suis quand même tombé de l’armoire quand il m’a dit qu’il lançait son écurie. J’ai pensé qu’il était fou. Il aime tellement la nature. Un jour, lui et moi étions invités à Beaune chez des amis. Henri nous dit soudain : « Je rentre, il faut que j’aille voir mon chien ! » Il voulait devenir agriculteur. Mais le démon du Mans l’a rattrapé…
Pour autant, je ne lui ai jamais demandé un volant pour un de mes fils. Sans doute pensait-il qu’Anthony et Julien étaient trop axés sur la monoplace, et à ce titre trop individualistes. Donc ça ne s’est pas trouvé. Mais tel que je le connais, ça lui aurait fait plaisir d’avoir, dans son écurie, un fils Beltoise. Et ça ne nous empêche pas de partager une bonne bouteille de temps en temps.

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